Quelques heures après la conférence de presse du président de la CENI au tour du processus électoral, le vice-président de l’organe de gestion des élections en Guinée à travers une déclaration à fait des révélations axées sur les dysfonctionnements qu’enregistre notamment le processus d’enrolement des électeurs.
Lire ci-dessous le décryptage du courrier.
DECLARATION
Je, soussigné, Mamadou Bano SOW Vice-président de la CENI, dénonce le fichier électoral guinéen en cours de révision. Je formule la recommandation suivante :
Reprendre le chronogramme des élections législatives pour le décomposer en deux étapes :
– révision du fichier électoral, audit du fichier électoral révisé, correction des anomalies, évaluation sur le terrain des citoyens laissés pour compte pour leur donner la possibilité de s’enrôler ; certifier le fichier final ;
– élaborer le chronogramme des élections après la finalisation d’un fichier électoral consensuel
Je dénonce la révision du fichier en cours. Je suis désarmé face à un système puissant, bien élaboré, qui impliquerait le Président de la CENI, la mouvance et le Pouvoir par l’interférence de l’administration.
Tout est bien orchestré.
Un chef secteur qui « décide » qu’un président de CAERLE ne travaille plus sur son territoire. Un chef de quartier qui « décide » de vendre un certificat qui est pourtant gratuit et qui le délivre de manière discriminatoire. Des membres de CAERLE emprisonnés au gré de l’autorité locale. Des représentations diplomatiques qui décident du déploiement des Kits d’enrôlement ou de l’arrêt du processus d’enrôlement. Des représentations diplomatiques, qui normalement habituées à remplir les formalités d’usage, qui accusent du retard pour saisir les autorités des pays hôtes. Des consulats qui créent des difficultés dans la délivrance des cartes consulaires.
Insuffisance injustifiée de matériels essentiels pour l’enrôlement : formulaires d’inscription, récépissés…; lancement précipité et désordonné des opérations de révision ; introduction de formulaires d’identification qui a semé la confusion, pendant que certains opérateurs de bonne ou de mauvaise foi disent aux électeurs qui disposent d’un formulaire d’identification qu’ils n’ont pas besoin de s’enrôler en contradiction totale avec la recommandation forte de l’audit R1 ; réduction de moitié du nombre d’opérateurs par kit ;
Un chef d’orchestre aguerri
A mon arrivée à la CENI, j’ai fait le jugement suivant. Le président de la CENI est un homme intelligent, qui a une bonne connaissance de la CENI et une expérience avérée. Il a une grande capacité de travail. Ce que je ne pouvais pas imaginer était qu’il était capable de conduire le processus électoral et tous les acteurs du processus dans la situation préoccupante actuelle. Et le plus grave, tout les acteurs l’accompagne ; peut être en se disant qu’ils sont bien représentés à la CENI.
Je dénonce le fonctionnement de la CENI. A distance, j’ai suivi les péripéties et tractations qu’il y’a eu pour changer la loi, les Commissaires de la CENI et les présidents qui se sont succédés. Aujourd’hui de l’intérieur, je comprends mieux ce qui a manqué pour améliorer la situation. Après l’audit du fichier, il devrait s’en suivre l’audit du fonctionnement de la CENI. C’est aujourd’hui encore une nécessité.
Quelques illustrations. Je suis Vice-président, je ne pense pas être seul dans cette situation. Je n’ai jamais vu le contrat signé avec Innovatrics, les précédents contrats non plus, du reste. Malgré toutes les compétences techniques parmi les 17 commissaires actuels, je ne connais pas un seul qui a accès à la base de données pour dire à la plénière voilà ce qui s’y passe, voilà où nous en sommes.
En février dernier, crédule et inexpérimenté que j’étais, voici ce que je suggérai :
• Que le site central de la CENI soit administré par un service administratif et
technique et placé sous l’autorité du département fichier.
• Que le fichier soit géré au site central et un backup quotidien en mode lecture soit
cogéré par des commissaires de la CENI afin d’effectuer le contrôle et suivi de toutes
les activités menées au site.
• Que le Président de la CENI dispose de tous les privilèges pour la gestion de tous les
mots de passe.
Aujourd’hui, le site central est placé sous le seul contrôle direct du président. Il n’y a pas aucune possibilité pour commissaire, si compétent soit-il en informatique, d’évaluer ou de contrôler les travaux sur le fichier. Seul le président peut demander une information ou donner une instruction à l’opérateur Innovatrics.
Les 16 autres commissaires que nous sommes, sont censés validés le fichier qui en sortira pour que les acteurs du processus soient en confiance.
Personnellement, pour le moment, je suis au regret de dire que je ne suis pas à mesure de certifier les travaux du fichier en cours.
Conakry, 16 décembre 2019
Elh Mamadou Bano SOW