Le président américain Donald Trump a annoncé qu’il allait reporter à une date non précisée le sommet du G7 prévu en juin 2020 aux États-Unis. Un G7 qu’il souhaite à l’automne dans une version élargie à d’autres pays comme la Russie, la Corée du Sud, l’Australie et l’Inde, et sans la Chine.

« Je n’ai pas le sentiment que le G7 représente correctement ce qui se passe dans le monde. C’est un groupe de pays très dépassé », a déclaré le président Donald Trump à des journalistes à bord de Air Force One samedi 30 mai, ajoutant qu’il aimerait inviter la Russie, la Corée du Sud, l’Australie et l’Inde à se joindre à un sommet élargi. Le G7 se compose aujourd’hui du Royaume-Uni, du Canada, de la France, de l’Allemagne, de l’Italie, du Japon et des États-Unis, qui préside cette année.

« Concevoir un troisième format, c’est changer totalement de logiciel »

Mais le format proposé par le président américain semble peu envisageable pour Bertrand Badie, professeur à Sciences Po et chercheur au Centre de recherches internationales (Ceri). « Le G7 est un format qui a été inventé en 1975 à l’initiative du président Giscard d’Estaing, qui comprenait sept puissances occidentales. Lorsqu’on est sorti de la bipolarité et à la faveur notamment de la crise de 1997, mais surtout de celle de 2008, on a élargi ce G7 à un G20 qui incluait notamment la Chine et les puissances émergentes. Les deux formats existent parallèlement aujourd’hui. En concevoir un troisième, c’est changer totalement de logiciel puisque ces fameux « G » étaient conçus pour pouvoir créer des conditions d’une concertation entre puissances, souligne-t-il. Un G7 élargi sans la Chine, c’est un G7 de coalition et de coalition contre le grand absent. Donc fidèle à lui-même, Donald Trump est, non pas dans une logique multilatérale de concertation, mais dans une logique parfois unilatérale, et cette fois, de coalition et non plus effectivement d’intégration. »

Une réunion qui pourrait avoir lieu en septembre, avant ou après l’Assemblée générale des Nations unies, a ajouté Donald Trump, ou après l’élection présidentielle de novembre où il va briguer un second mandat.

Provocation antichinoise

Pour le chercheur du Ceri, il est peu probable de voir l’Europe suivre le locataire de la Maison Blanche dans ce qui ressemble à une mise à l’écart de la Chine. « La Russie faisait partie du G7 qui était donc à l’époque, et jusqu’en 2014, le G8, et en a été exclue suite à l’annexion de la Crimée par Moscou, rappelle Bertrand Badie. La situation étant sur ce plan identique, on ne voit pas comment on pourrait réintégrer la Russie et laisser dehors d’autres puissances. D’une façon plus générale, est-ce que les autres membres du G7 voudront suivre Trump dans une politique militante et active antichinoise ? C’est quand même peu probable. L’Europe essaie de jouer, sinon la médiation du moins une carte qui lui serait propre dans le duel entre Pékin et Washington, ce serait assez étrange de la voir suivre le patron de la Maison Blanche. Quant au Japon, c’est bien sûr un rival de la Chine, mais il est peu probable que les responsables japonais acceptent de s’engager dans une politique qui sera inévitablement perçue comme une politique de provocation antichinoise. »

Les dirigeants du G7 devaient se réunir par vidéoconférence fin juin en raison de l’épidémie de coronavirus. Mais le président américain avait indiqué la semaine dernière qu’il pourrait finalement organiser ce grand rassemblement, « principalement à la Maison Blanche » mais aussi potentiellement en partie dans la résidence présidentielle de Camp David, à la périphérie de Washington. Angela Merkel avait été la première à décliner formellement l’invitation en raison du coronavirus, poussant sans doute le président américain à envisager d’autres dates.

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