Le président ivoirien Alassane Ouattara a été officiellement investi samedi 22 août, à Abidjan candidat de son parti à la présidentielle d’octobre, où il briguera un troisième mandat jugé inconstitutionnel par ses opposants.
« Je vous investis ce 22 août comme candidat du RHDP à l’élection présidentielle du 31 octobre 2020 », a déclaré Henriette Diabaté, première vice-présidente du parti au pouvoir, devant des dizaines de milliers de supporteurs rassemblés au stade Houphouët-Boigny.
Debout à ses côtés, le président Ouattara lui a ensuite donné des accolades. Le président Ouattara lui a ensuite donné des accolades et devait s’exprimer quelques minutes plus tard.
Troisième mandat
Élu en 2010 puis réélu en 2015, le chef de l’État, 78 ans, avait initialement annoncé en mars son intention de ne pas se représenter et de passer le relais à son Premier ministre Amadou Gon Coulibaly. Mais celui-ci est décédé brutalement le 8 juillet d’un infarctus, contraignant Alassane Ouattara à revoir ses plans et à annoncer qu’il briguerait finalement un troisième mandat.
L’annonce le 6 août de sa candidature a provoqué des manifestations qui ont dégénéré en violences pendant trois jours, faisant six morts, une centaine de blessés et 1 500 déplacés. En outre, 69 personnes ont été interpellées, selon un bilan officiel.
Changer la Constitution
Comme la précédente, la Constitution, révisée en 2016, limite à deux les mandats présidentiels. Les partisans de Alassane Ouattara affirment que cette révision a remis le compteur des mandats à zéro, mais ses adversaires jugent anticonstitutionnelle une troisième candidature.
« Constitutionnellement, le président Alassane Ouattara ne peut pas avoir un troisième mandat. Il ne peut pas être candidat et il le sait », s’insurge Maurice Kakou Guikahué, numéro deux du principal mouvement d’opposition, le Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI).
« C’est une candidature dangereuse qui arrive dans un contexte volatil », fustige de son côté l’opposant et candidat à la présidentielle Pascal Affi N’Guessan, 67 ans, ancien Premier ministre du président Gbagbo, chassé du pouvoir en 2011 à l’issue de plusieurs mois de crise post-électorale meurtrière.
Pascal Affi N’Guessan, patron d’une faction du Front populaire ivoirien (FPI) fondé par M. Gbagbo, a appelé Alassane Ouattara à « renoncer à ce troisième mandat afin de sortir dignement de l’arène politique », disant craindre dans le cas contraire « que l’avenir ne soit sombre, aussi bien pour lui que pour la Côte d’Ivoire ».
Vives protestations
La crainte de violences, à l’approche du scrutin du 31 octobre, est forte, dix ans après la crise née de la présidentielle de 2010, qui avait fait 3 000 morts et vu Alassane Ouattara accéder au pouvoir.
Le rejet ces dernières heures par la Commission électorale des recours de Laurent Gbagbo et de l’ancien chef rebelle Guillaume Soro contre leur radiation des listes électorales pourrait accroître encore les tensions générées par la 3e candidature de Alassane Ouattara.
Guillaume Soro, 47 ans, se dit candidat même s’il vit en exil après sa condamnation par la justice ivoirienne à 20 ans de prison pour « recel de détournement de deniers publics » et son entourage a annoncé sa volonté de faire appel devant les tribunaux.
L’ex-chef rebelle, qui a aidé M. Ouattara à accéder au pouvoir est aussi accusé de « tentative d’insurrection » dans le cadre d’une procédure toujours en cours en Côte d’Ivoire.
Quant à Laurent Gbagbo, acquitté en première instance par la Cour pénale internationale (CPI), il attend à Bruxelles un éventuel appel et dit vouloir revenir au pays, sans dévoiler ses projets politiques, même si ses partisans espèraient qu’il se présente à la présidentielle.
Un programme pour samedi
Le président Ouattara devrait dévoiler samedi son programme ainsi que ses slogans de campagne qui va se dérouler en pleine pandémie de Covid-19.
Il devrait s’appuyer sur son bilan économique, insister sur la relance et les bons chiffres de croissance qui ont permis au pays de retrouver un rôle important dans la région et sur le continent.
Le chef de l’État a promis plus de retombées de cette croissance pour les classes les plus démunies d’ici la fin de l’année.
Toutefois, ses opposants mettent en avant un climat politique toujours très tendu, une croissance peu partagée et une corruption toujours présente.
Son ancien allié, l’ancien chef d’État ivoirien Henri Konan Bédié (1993-1999), 86 ans, candidat du PDCI, sera le principal adversaire du président sortant.